Dames fantasmoagoriques

Ouverture
Elle enfanta Indignation,
pour la souffrance des hommes qui meurent,
elle, Nuit, l’affreuse,
et enfanta Tromperie et Bonne Amitié, Vieillesse effroyable,
et elle enfanta Jalousie au cœur dur
(Hésiode, Théogonie).
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La chute
Je pensais l’aimer pour toujours,
aussi longtemps que brûlerait l’éternel enfer de mon cœur (p. 43).
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La cascade
Aussitôt, le miroir explose joyeusement !
Propulsant vers moi des dizaines d’éclats de rires acérés dont les blessures auront gelé avant même de couler (p. 61).
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Le jet
Si je m’étais réveillé, ses mains eussent cessé de me caresser, ses jambes de me frôler, ses seins de se presser contre ma poitrine… (p. 95).
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Fuite
Dans ma chambre, à minuit noir,
Un peu j’aime m’évader
Par une ombre de miroir,
Un poème dévasté.
(p. 101)

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Notre or charnel

En voici encore une… encore une que je ne suis pas arrivé à finir… Il faut croire que j’ai cruellement manqué d’inspiration ! Mais elle a circulé, savez-vous… Laissez-moi vous conter son histoire…

Elle commence avec ce poème intitulé Que le temps nous désosse ! Titre qui en constituait également le dernier hémistiche, jusqu’à ce que, plusieurs mois plus tard, je décide d’y ajouter un quatrain en guise de conclusion.

Au-delà des taches de cerveau naturelles,
L’oeil alerte aura sondé le fond du pathos,
Ensevelis sous le tas de notre or charnel.
Attendant patiemment que le temps nous désosse.

Cet or charnel méritant que je m’y attarde, j’ai composé une fresque poétique en quatre parties, intitulée Notre or charnel. Cent dodécasyllabes volontairement irréguliers (pour que l’on doive y imposer une régularité).

Jumelles macrâles s’endiablent sur ma vierge noire,
La convoitent l’une l’autre au prix d’une diarrhée.
Agis par les sulfureux démons du placard,
Leurs balais de sexe assoiffés brassent les marées.

Ce fut sans doute le poème le plus énigmatique et le plus cru qu’il m’ait été donné d’écrire. Les images que j’y ai soulevé m’ont hanté. J’ai compris que je n’en avais pas fini avec l’or charnel… Alors j’ai entamé la nouvelle...

Notre or charnel

Solange et Angélique sont comme deux ailes de chauve-souris : elle batifolent ensemble, foncent à même allure, se plient puis se replient d’un commun accord et dorment côte à côte d’un sommeil sensible et renversant, toutes pendues qu’elles sont à leur charpente. Leur maison est faite d’un bois massif et profond, recouverte d’ombres ravissantes qui chaque nuit se glissent autour d’elles pour les protéger contre les lueurs d’ange.

Ainsi les deux sœurs, en tous points semblables, ont été élevées dans la noire chaleur de l’habitat. Telle était la volonté de leur mère, la monstrueuse Louve noire, dont on assure que le sein perlait du sang.

Solange et Angélique appartiennent à la caste des sorcières d’Ombre. Elles se distinguent de leurs pairs, car la nuit d’obsidienne qui a présidé leur naissance les a dotée d’une paire d’ailes à plumes d’encre. Elles sont nées jumelles sous le signe de la Lune noire. C’est un funeste soir, un soir où nul astre ne brille, qui les accueillit dans leur vie d’obsidienne.

Les nouveaux nés de ces nuits reçoivent la marque du Chaudron dévorant. Elle scintille au fond de leur sexe et nul ne peut la voir, à moins d’y laisser l’œil. Seules les femmes ont droit à cet égard, les hommes nés la même nuit sont égorgés vifs en même temps que noyés dans un bain d’absinthe bouillonnant.

Leur corps exsangue est exposé aux pâles spectres de l’autel lunaire, au cœur même de la Forêt des Sorcières. Leur tendre chair est une friandise réservée aux suivants de la Louve noire, et leurs ossements alimentent les pensées des arbres morts. Quant à leur sang mêlé de liqueur folle, il est livré comme philtre aux lupanars.

Certes, les sorcières habitent la forêt. Une forêt parsemée de chênes séculaires aux branches à tel point tortueuses qu’elles semblent vouloir se nouer d’arbre en arbre, comme pour sceller l’union de la nature.  

Leurs feuilles ont la couleur du ciel qui ne connaît pas le jour et sont éternelles. Jamais l’automne ne les emporte.

Parmi ces êtres, il en est un plus ancien, titanesque, qui depuis que les hommes ont appris à penser fait office de lien entre fantasmes et réalité.

Et, comme vous le savez, j’ai laissé cette nouvelle à l’abandon… Cela dit, la blessure était trop forte et les personnages attachants. J’ai donc investi la poésie avec le couple d’obsidienne, explorant d’autres horizons…

Lune pour l’hôte

Solange Angélique
Sont comme deux ailes de chauve-souris
Jamais lune sans l’autre
Elles voyagent au fil de la nuit
Succubes et soyeuses
En proie aux délices de l’offrande

Croqueuse et cynique
Solange mord les rêves et les cris
Ses fidèles apôtres
Apportent à sa bouche leurs minuits
Câline et songeuse
Elle caresse l’espoir en amande

Vautrée sans sommeil
Angélique enseigne la musique
Ses élèves absents
Trépassent à la dernière note rouge
Subtile et poète
Elle endort l’espoir insolent

Elles se disent pareilles
Mais l’une s’éclipse quand l’autre applique
Elles goûtent au même sang
Lune est calice si l’autre est rouge
Elles se surent ascètes
Mais leurs corps leur sont succulents

Aujourd’hui, j’ai envie de poursuivre la nouvelle, car elle me semble riche d’une histoire personnelle en plus de son contenu. Et vous, lecteurs venus du fin fond du cyberespace, qu’en diriez-vous ?

Les Mouvemhantés

« C’est comme si tu voulais dire quelque chose à quelqu’un de façon très précise, mais que c’est trop compliqué pour le faire avec des vrais mots ». Hermann.

Vingt crocodiles, dix-sept mammouths au ciel nuagé quand le sucre apparenté rend l’âme aux tombes de demain. Franche toile aux argents épicés, prend ma garde et pourfend dix francs de l’étoile vidée aux essences de l’emprunt. À quoi bon fossile de l’autre ère ? Mal avisés que saumâtres ! Est-ce un puits que je m’ivrogne ? Sachant ma flamme buée, n’en veut ni tête ni pointe, et flanc demeure parlé. Par l’acte et la voie des inondés nous estons frères en nos seins peinturlurons. Bière et fumelette, bien d’herbe grillons des sauterelles ; trésors de brins fumants quoi que la forme en mange les soins. En l’idée qu’inhumaine la vie ne soit, parviens de même à lire en moi l’humée d’aucun espoir à sourire pour autre que la mort d’un humour flétrissure. Oncque ne fit ce qu’oncque ne peut, cancrelats je me cervelles des tranquilles assemblées qui douloureusement n’y reviennent à point. Fières estrilles de l’abysse imbuvable qui sous les sables des erreurs fouissent un terrible déclin relevé de piquette assombrie démystifiée. Cents bras ni vœux, sœur ne peut ni ne pourra sans avoir pu. Qu’un jour faillisse l’émoi des cerfs forestiers trop prompts à saisir les pieds de biche. Cents pieds l’odeur affronte les montagnes.

Thanatotrope 2213

Voici le début d’une nouvelle dont j’ai décidé de reprendre l’écriture après un long moment de manque d’inspiration. J’espère qu’elle vous plaira. Et surtout, n’hésitez pas à la commenter, pour me donner des idées.

Thanatotrope 2213
Entrée froide

On entendit le roulement froid et lourd d’un interminable tiroir métallique. Le clappement final retentit très fort dans cette petite salle crûment éclairée. Le carrelage poli accusa des pas décidés. À leur approche coulissa une porte automatisée qui, une fois refermée, laissa derrière elle un calme stérilisé. La lumière là-bas déclina. En revanche, elle s’enclencha spontanément du présent côté. Si bien qu’un interstice doublement vitré laissait un rayon lumineux tronçon-ner, dans le sens de la longueur et de la tête aux pieds, le cadavre abandonné momentanément sur sa planche d’opération. Si cette tête blême avait pu forcer son cou à se redresser un peu, puis ses paupières à s’ouvrir, elle eût aperçu de là-bas que quelqu’un se dirigeait vers une petite table où roucoulait un très vieux modèle de machine à café…

L’on écarta bruyamment une chaise en bois, prit une tasse en porcelaine puis s’y versa une larme d’ombre. L’écoulement du breuvage, sa senteur amère et la chaleur qu’il diffusait rassurè-rent « on », le tranquillisèrent, le firent s’abandonner. « On » ne se sentait-il pas un peu seul dans l’anti-chambre des morts ? Probablement.

Notre cadavre, s’il avait encore pu demeurer circonspect, l’eût été certainement de voir « on » faire à présent les cent pas en tournant, prostré sur son philtre fumant, qu’il considérait avec gravité. Il se fût demandé quel rituel était-ce là. « On » tournait, physiquement et psychi-quement. Ses globes oculaires, aussi refroidis que leur objet d’étude quotidien, tentaient de se noyer en la noire substance qui réduisait après chaque gorgée. Quand enfin il n’en resta plus une goûte, le cercle brunâtre imprimé au fond du récipient renvoya « on » à sa misère cyclique. Mais la boisson fit son effet…

Un étrange bien-être, un état de relaxation physiologique généralisé.

« On » se sentit bien. Et, s’il l’avait pu, notre autopsié, aux premières loges, eût vite fait de s’alarmer en voyant « on » lâcher sa tasse, chanceler, puis tomber à la renverse pour heurter la petite table de la tête. La nuque brisée, il gisait par terre, du café plein la chemise, et le front investi par le filtre usagé, expulsé humide et mou de son réservoir.

Tourne en corps

Voici l’introduction d’une nouvelle en gestation intitulée « Tourne en corps ». J’ai l’intension d’y dresser une peinture surréaliste des transports en commun liégeois. Le personnage principal est un bus. Chaque chapitre après cette introduction portera le numéro d’une ligne et témoignera de sensations étranges et diverses ressrnties sur plus de 15 ans d’usage des TEC.

Pneumonie

La roue tourne. Un pigeon meurt. Énorme roue. Tout écrasé. Vroum! Sprotch! Cervelle et viscères envolées de leur carcasse tourneront à leur tour. Elles fusionneront. La roue tourne entrainant sa suivante. Vroum! Sprotch! Aligné désormais au rez-de-chaussée, le plan P (pigeon) est égal au plan B (bitume). P = B. Plat, comme la Belgique. En guise de linceul, un nuage noir et suffoquant rehaussé par un soupir mécanique. Une minute après le passage de ce mastodonte des temps modernes, emblème de la faune liégeoise, ses congénères à tristes plumes viendront picorer autour de lui, carpette méconnaissable, quelques miettes providentielles d’une nourriture citadine hautement suspecte. Autour de lui, nivelé au plus bas de la considération urbaine, ils tourneront en roucoulant. Une danse macabre, et pour lui et pour eux ; mais ils l’ignorent. Ils ignorent qu’un jour, grâce aux mutations occasionnées par la surconsommation d’une gastronomie incertaine, il leur poussera une troisième aile qui les empêchera de s’envoler. Dès lors, ils tourneront, roucoulant, en quête des restes chus de l’insouciance humaine.

Le Jet

Le Jet

Cette histoire est dédiée à tous ceux qui n’auront pas peur de tomber, ni de se relever après leur chute. Car elle est plus profonde qu’une histoire d’homme, c’est un récit d’émotions pures où les pulsions sont toutes-puissantes. J’ai voulu que chaque mot soit comme une marche d’un escalier sans fin s’engouffrant dans notre inconscient. Mais j’ai tenté d’y remplacer l’obscurité par une lumière trouble. Qui veut y trouvera son chemin…

Extrait

« Des battements d’ailes ont perturbé mon sommeil. J’ai senti des caresses. C’était peut-être le vent. J’ai voulu saisir le pan de lucidité qui flottait au-dessus de moi, mais pour cela j’eus dû ouvrir les yeux, et je ne voulais pas savoir si c’était Elle qui soufflait ou le vent. Si je m’étais réveillé, ses mains eussent cessé de me caresser, ses jambes de me frôler, ses seins de se presser contre ma poitrine… Son sexe eût fini de m’accueillir. Si j’avais tenté de la regarder dans les yeux, je n’y eus vu que le triste reflet de ma solitude. Existé-je seulement ? »

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Disponible chez Chloé des Lys