Un roman policier, certes. Mais ne surtout pas se fier à la quatrième de couverture de la version de poche (10|18) qui annonce « ce roman aux accents d’Agatha Christie et de Lewis Caroll ». En effet, rien de fantastique, de surréaliste ni de métaphorique dans ce récit qui s’avère plutôt même scientifique. Quant à Agatha Christie, je suppose qu’il y a lieu de trouver des points communs entre n’importe quel récit policier et au moins un de ses romans. Le genre d’Alan Bradley est quelque peu autre.
Nous somme en Angleterre, à l’époque du roi George VI, aux portes de l’été 1950. L’intrigue se déroule dans une bourgade aux alentour du château de Buckshaw (domaine de la famille de Luce), et dans le château même. La narration se fait par le monologue intérieur du personnage principal.
L’héroïne, Flavia de Luce, est une curieuse petite fille d’onze ans. Elle est la fille de Haviland de Luce, colonel à la retraite, et d’Harriet, disparue après une chute d’alpinisme vers ses 1 an (Flavia, pour qui sa mère demeure une inconnue se plaît à l’évoquer par son prénom). Ses deux sœurs aînées, Ophélia (Fély) et Daphné (Daffy) lui mènent la vie dure, mais elle le leur rend au centuple ! Il s’agit d’un personnage savant, calculateur, ingénieux et teinté de la froideur émotionnelle des de Luce. Sa grande passion est la chimie (Lavoisier est l’une de ses idoles), à laquelle elle s’adonne régulièrement au su de tous dans le laboratoire familial ; avec un faible à peine voilé pour les poisons.
Un inconnu assassiné dans le potager, le père, suspect principal, en détention provisoire… et l’enquête commence. Pas seulement pour la police, mais aussi pour Flavia, prête aux plus folles investigations et pleine de suite dans les idées ! L’inspecteur Hewitt, qu’on ne verra que par épisodes, vient généralement corroborer (sans le savoir) les suppositions de Flavia ou lui donner de nouvelles pistes. Leurs enquêtes parallèles se recoupent, mais Flavia a parfois une méthode moins orthodoxe. Sa chimie lui est d’une grande utilité.
Le personnage principal est attachant, ses développements tiennent la route, peut-être un peu trop pour une enfant de cet âge, mais, justement, cela fait partie du personnage : une sorte de savante folle prépubère aux préoccupations morbides. Les personnages secondaires et quelques protagonistes ne manquent pas de vie ni de cohérence. Le style est malgré tout plutôt linéaire, se distinguant par la redondance quasi-systématique des « comparaisons » qui alourdissent le texte. Les allusions scientifiques raviront les intéressés mais pourront décontenancer le béotien (que je suis). L’intrigue est assez simple, sans nécessairement être convenue ; mais j’espère que le meilleur est à venir, car les idées développées autour des personnages ont du potentiel, et le manoir familial (Buckshaw) n’a peut-être pas livré tous ses secrets. Je laisserai à Alan Bradley une seconde chance de me séduire plus globalement.
L’ouvrage The Sweetness at the Bottom of the Pie (titre original) a remporté les prix Debut Dagger Award, Agatha et Arthur Ellis. Son auteur, Alan Bradley, est un septuagénaire canadien. La série comporte 6 épisodes dont 3 traduits en français, elle connaît un franc succès et sera bientôt adaptée en série télévisée par Sam Mendes (American Beauty).
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Consulter le blog de Flavia de Luce (anglais).